Titre : | Le carilloneur de Bruges | Type de document : | partition musicale imprimée | Auteurs : | Albert Grisar, Compositeur | Editeur : | Münich : Musikproduktion Jürgen Höflich | Année de publication : | 2005 | Collection : | Opera explorer | Sous-collection : | The flemish music collection num. 35 | Importance : | 1 partition (483 p.) | Format : | 23 cm | Langues : | Français (fre) Allemand (ger) Anglais (eng) (nla) | Catégories : | Orchestre
| Résumé : | Albert Grisar
(Anvers, 26 décembre 1808 - Asnières, 15 juin 1869)
Le Carillonneur de Bruges
(1852)
Dans l’ensemble de l’œuvre d’Albert Grisar, compositeur renommé pour ses opéras bouffes, l’opéra historique Le Carillonneur de Bruges constitue une œuvre à part. Comment un sujet aussi flamand que celui de l’occupation espagnole et du carillon ait pu arrivé jusque au librettiste français, Jules-Henri Vernoy de Saint-Georges, n’est pas clair du tout. Etait-ce Grisar qui lui avait demandé d’écrire le livret, ou, était-ce, au contraire, de Saint-Georges qui avait opté pour un thème flamand afin de pouvoir travailler avec Grisar ?
Cet opéra en trois actes a comme décor la ville de Bruges sous la domination espagnole et comme protagoniste le vieux Carillonneur Mathéus Claës, un personnage qui ressemble au Quasimodo de Hugo mais qui, lui, est devenu sourd à cause du carillonnement de ses cloches bien-aimées. Cette surdité est d’ailleurs un élément dramatique important dans le déroulement de l’histoire.
Quand les Espagnols s’emparent de sa ville bien-aimée et baissent le drapeau flamand, Mathéus, patriote, a la mort dans l’âme. Sa fille, Béatrix, est amoureuse de Wilhem, un «capitaine au service de l’Espagne». Contrairement à la thématique shakespearienne de Roméo et Juliette, Mathéus accepte que Wilhem épouse sa fille. Or, le neveu de Mathéus, l’aubergiste Van Bruck, et sa nièce Mésangère vont semer la discorde en prétendant que Béatrix a un amant secret qui lui rend visite la nuit. Cela perturbe considérablement Wilhem et Mathéus. Le secret que garde Béatrix est cependant d’un tout autre ordre : elle cache chez elle le fils de Marie de Brabant. Nonobstant la séquestration par Philippe II de la comtesse, celle-ci a réussi à se marier secrètement et à accoucher d’un héritier. Béatrix, en tant que sœur de lait de la comtesse, empêche ainsi au petit garçon de tomber entre les mains de l’ennemi espagnol.
Un jour que, Mésangère, une chanteuse populaire qui vend des images de la Sainte Vierge, rend visite à Béatrix, elle est suivie par don Juan d’Hermosa, le gouverneur espagnol, et quelques-uns de ses officiers. Séduit par les charmes de Mésangère, celui-ci fait honneur à son nom et demande à la belle de chanter pour lui. Après que Mésangère lui a chanté une chanson espagnole évoquant l’histoire du noble hidalgo Giuseppé qui fut trompé, un confident du gouverneur vient lui rapporter que la comtesse s’est enfuie. Quand le gouverneur menace alors de fouiller la maison de Béatrix où dort paisiblement le petit garçon de Marie de Brabant, la comtesse quitte sa cachette et se livre à l’ennemi. Au moment où le chœur rend hommage au drapeau de la Flandre, Mathéus retrouve l’ouïe et entend sonner ses cloches : Mes cloches, c’est bien là votre voix! Ensuite, Van Bruck, pris de boisson, confie à un des hommes du gouverneur qu’il a vu Béatrix portant un enfant dans les bras. Il a raconté cela en présence de Mathéus sans savoir que celui-ci pouvait l’entendre. Dans ces propos, Mathéus voit la preuve que sa fille a un enfant de son amant. Le gouverneur, par contre, réalise qu’il pourrait bien s’agir du fils de la comtesse. Aussi Béatrix persiste-t-elle à faire croire à tout le monde que l’enfant est le sien et elle affronte la colère de son père : Père! Je viens demander grâce, si vous saviez... si j’osais dire, j’ai juré! de me taire hélas. Mathéus rejette sa fille et la chasse.
L’insurrection contre les Espagnols se fera à Noël, et le signal sera donné la nuit par Mathéus et ses cloches. Alors qu’il sonne le carillon, Mésangère lui apporte une lettre de sa fille dans laquelle Béatrix écrit qu’étant donné son impossibilité de révéler la vérité elle se jettera de la tour au son des cloches. Effaré, Mathéus cesse le carillonnement, mais à cet instant, il entend un cri perçant. Il pense que sa fille est passée à l’acte mais heureusement Van Bulck a pu l’en empêcher et l’opéra se termine par un hommage au drapeau de la Flandre. Ce qui n’a pas empêché Grisar et Saint-Georges de dédier cet opéra d’inspiration patriotique à «sa Majesté Léopold Ier, Roi des Belges».
Le Carillonneur de Bruges fut présenté à l’Opéra-Comique de Paris le 20 février 1852. Aucune peine n’est épargnée quant à la mise en scène et Grisar a pu travailler avec une distribution de rêve. La basse Bataille, grand comédien a ajouté au rôle de Mathéus une touche comique. Le rôle de Béatrix est interprété par la débutante Palmyre Wertheimber, contralto. Cette interprétation marqua, pour cette jeune femme de vingt ans le début d’une grande carrière internationale. La soprano, Marie Félix-Miolan - dont l’interprétation, plus tard, de la prima donna Miolan-Carvalho au Théâtre-Lyrique connaîtra un grand succès - joue le rôle de Mésangère. Quant au personnage de Van Bulck, celui-ci est interprété par Charles-Louis Sainte-Foy, ténor bouffe s’étant produit dans plus de soixante premières mondiales, parmi lesquelles Les Porcherons et Le Joaillier de Saint-James de Grisar.
L’aria de Mésangère où celle-ci chante les mésaventures du «noble hidalgo Guiseppé» constitue un des grands succès de l’opéra. Dans la Revue et Gazette musicale de Paris du 22 février 1852, le critique Henri Blanchard a donné de cette aria écrite sur le modèle du boléro espagnol une description élogieuse : «cette perle de mélodie enchâssée dans une harmonie légère et brillante qui en fait ressortir au mieux le caractère ibérien.» Le chœur des buveurs de bière dans le troisième acte a également été applaudi.
Bien que la vocation de Grisar fût l’opéra-bouffe, il montre, avec ce livret, des ambitions plus sérieuses. Pour certains critiques, le livret est plutôt d’inspiration politique que dramatique, et, le sujet plus apte à Giacomo Meyerbeer. Un journaliste considère le livret comme «une erreur d’un homme de talent», tandis que Henri Blanchard écrit : «Sur ce tableau coloré des passions ardentes du Moyen-Âge, le compositeur a jeté des chants et une harmonie de toutes les époques. Il a tenté de faire de l’Orlando Lassus, du Bach, car il s’est essayé au style fugué dans un morceau bachique; du Grétry, du Méhul, du Boieldieu, de l’Hérold et jusqu’à du Verdi, dans les masses vocales et les détonations de l’instrumentation. Ce qui lui a le mieux réussi, c’est quand il a fait du Grisar, de l’harmonie et des mélodies faciles (...). L’ouverture témoigne du respect du compositeur pour la vieille et bonne forme de ces préfaces musicales.» Grisar a bien su se servir du crescendo à la Rossini. En outre, les imitations de cloches que produit l’orchestre à certains moments de l’action conféraient à l’ensemble un attrait supplémentaire.
Avec l’opéra, Grisar a brodé sur la tradition de son compatriote André-Modeste Grétry. Il avait le don de la mélodie, sa façon de mettre un dialogue sur musique était incomparable et ses œuvres respirent généralement la finesse, le charme et l’esprit. Ses opéras reçoivent l’approbation du public et de ses collègues. Dans un article sur «la musique bouffe», une sommité comme Jacques Offenbach nomme Grétry, Rossini et Grisar d’un trait. Après sa mort, ce compositeur flamand qui a passé la plus grande partie de sa carrière à Paris est loué par la presse de la musique française comme «l’un des compositeurs les plus aimés de l’école française» et comme un «savant et fécond mélodiste». Avec Le Carillonneur de Bruges, Grisar a attiré l’attention des Parisiens sur Bruges et le carillon bien avant Georges Rodenbach avec Bruges-la-morte (1892) et Le Carillonneur (1897).
Jan Dewilde, 2005 (traduction: Annick Mannekens)
Pour la location du materiel: Muziekbibliotheek VRO-VRK/Albertina-bibliotheek, Brussel
Réimpression d'un exemplaire de la Bibliothèque du Conservatoire d'Anvers. |
Le carilloneur de Bruges [partition musicale imprimée] / Albert Grisar, Compositeur . - Musikproduktion Jürgen Höflich, 2005 . - 1 partition (483 p.) ; 23 cm. - ( Opera explorer. The flemish music collection; 35) . Langues : Français ( fre) Allemand ( ger) Anglais ( eng) ( nla) Catégories : | Orchestre
| Résumé : | Albert Grisar
(Anvers, 26 décembre 1808 - Asnières, 15 juin 1869)
Le Carillonneur de Bruges
(1852)
Dans l’ensemble de l’œuvre d’Albert Grisar, compositeur renommé pour ses opéras bouffes, l’opéra historique Le Carillonneur de Bruges constitue une œuvre à part. Comment un sujet aussi flamand que celui de l’occupation espagnole et du carillon ait pu arrivé jusque au librettiste français, Jules-Henri Vernoy de Saint-Georges, n’est pas clair du tout. Etait-ce Grisar qui lui avait demandé d’écrire le livret, ou, était-ce, au contraire, de Saint-Georges qui avait opté pour un thème flamand afin de pouvoir travailler avec Grisar ?
Cet opéra en trois actes a comme décor la ville de Bruges sous la domination espagnole et comme protagoniste le vieux Carillonneur Mathéus Claës, un personnage qui ressemble au Quasimodo de Hugo mais qui, lui, est devenu sourd à cause du carillonnement de ses cloches bien-aimées. Cette surdité est d’ailleurs un élément dramatique important dans le déroulement de l’histoire.
Quand les Espagnols s’emparent de sa ville bien-aimée et baissent le drapeau flamand, Mathéus, patriote, a la mort dans l’âme. Sa fille, Béatrix, est amoureuse de Wilhem, un «capitaine au service de l’Espagne». Contrairement à la thématique shakespearienne de Roméo et Juliette, Mathéus accepte que Wilhem épouse sa fille. Or, le neveu de Mathéus, l’aubergiste Van Bruck, et sa nièce Mésangère vont semer la discorde en prétendant que Béatrix a un amant secret qui lui rend visite la nuit. Cela perturbe considérablement Wilhem et Mathéus. Le secret que garde Béatrix est cependant d’un tout autre ordre : elle cache chez elle le fils de Marie de Brabant. Nonobstant la séquestration par Philippe II de la comtesse, celle-ci a réussi à se marier secrètement et à accoucher d’un héritier. Béatrix, en tant que sœur de lait de la comtesse, empêche ainsi au petit garçon de tomber entre les mains de l’ennemi espagnol.
Un jour que, Mésangère, une chanteuse populaire qui vend des images de la Sainte Vierge, rend visite à Béatrix, elle est suivie par don Juan d’Hermosa, le gouverneur espagnol, et quelques-uns de ses officiers. Séduit par les charmes de Mésangère, celui-ci fait honneur à son nom et demande à la belle de chanter pour lui. Après que Mésangère lui a chanté une chanson espagnole évoquant l’histoire du noble hidalgo Giuseppé qui fut trompé, un confident du gouverneur vient lui rapporter que la comtesse s’est enfuie. Quand le gouverneur menace alors de fouiller la maison de Béatrix où dort paisiblement le petit garçon de Marie de Brabant, la comtesse quitte sa cachette et se livre à l’ennemi. Au moment où le chœur rend hommage au drapeau de la Flandre, Mathéus retrouve l’ouïe et entend sonner ses cloches : Mes cloches, c’est bien là votre voix! Ensuite, Van Bruck, pris de boisson, confie à un des hommes du gouverneur qu’il a vu Béatrix portant un enfant dans les bras. Il a raconté cela en présence de Mathéus sans savoir que celui-ci pouvait l’entendre. Dans ces propos, Mathéus voit la preuve que sa fille a un enfant de son amant. Le gouverneur, par contre, réalise qu’il pourrait bien s’agir du fils de la comtesse. Aussi Béatrix persiste-t-elle à faire croire à tout le monde que l’enfant est le sien et elle affronte la colère de son père : Père! Je viens demander grâce, si vous saviez... si j’osais dire, j’ai juré! de me taire hélas. Mathéus rejette sa fille et la chasse.
L’insurrection contre les Espagnols se fera à Noël, et le signal sera donné la nuit par Mathéus et ses cloches. Alors qu’il sonne le carillon, Mésangère lui apporte une lettre de sa fille dans laquelle Béatrix écrit qu’étant donné son impossibilité de révéler la vérité elle se jettera de la tour au son des cloches. Effaré, Mathéus cesse le carillonnement, mais à cet instant, il entend un cri perçant. Il pense que sa fille est passée à l’acte mais heureusement Van Bulck a pu l’en empêcher et l’opéra se termine par un hommage au drapeau de la Flandre. Ce qui n’a pas empêché Grisar et Saint-Georges de dédier cet opéra d’inspiration patriotique à «sa Majesté Léopold Ier, Roi des Belges».
Le Carillonneur de Bruges fut présenté à l’Opéra-Comique de Paris le 20 février 1852. Aucune peine n’est épargnée quant à la mise en scène et Grisar a pu travailler avec une distribution de rêve. La basse Bataille, grand comédien a ajouté au rôle de Mathéus une touche comique. Le rôle de Béatrix est interprété par la débutante Palmyre Wertheimber, contralto. Cette interprétation marqua, pour cette jeune femme de vingt ans le début d’une grande carrière internationale. La soprano, Marie Félix-Miolan - dont l’interprétation, plus tard, de la prima donna Miolan-Carvalho au Théâtre-Lyrique connaîtra un grand succès - joue le rôle de Mésangère. Quant au personnage de Van Bulck, celui-ci est interprété par Charles-Louis Sainte-Foy, ténor bouffe s’étant produit dans plus de soixante premières mondiales, parmi lesquelles Les Porcherons et Le Joaillier de Saint-James de Grisar.
L’aria de Mésangère où celle-ci chante les mésaventures du «noble hidalgo Guiseppé» constitue un des grands succès de l’opéra. Dans la Revue et Gazette musicale de Paris du 22 février 1852, le critique Henri Blanchard a donné de cette aria écrite sur le modèle du boléro espagnol une description élogieuse : «cette perle de mélodie enchâssée dans une harmonie légère et brillante qui en fait ressortir au mieux le caractère ibérien.» Le chœur des buveurs de bière dans le troisième acte a également été applaudi.
Bien que la vocation de Grisar fût l’opéra-bouffe, il montre, avec ce livret, des ambitions plus sérieuses. Pour certains critiques, le livret est plutôt d’inspiration politique que dramatique, et, le sujet plus apte à Giacomo Meyerbeer. Un journaliste considère le livret comme «une erreur d’un homme de talent», tandis que Henri Blanchard écrit : «Sur ce tableau coloré des passions ardentes du Moyen-Âge, le compositeur a jeté des chants et une harmonie de toutes les époques. Il a tenté de faire de l’Orlando Lassus, du Bach, car il s’est essayé au style fugué dans un morceau bachique; du Grétry, du Méhul, du Boieldieu, de l’Hérold et jusqu’à du Verdi, dans les masses vocales et les détonations de l’instrumentation. Ce qui lui a le mieux réussi, c’est quand il a fait du Grisar, de l’harmonie et des mélodies faciles (...). L’ouverture témoigne du respect du compositeur pour la vieille et bonne forme de ces préfaces musicales.» Grisar a bien su se servir du crescendo à la Rossini. En outre, les imitations de cloches que produit l’orchestre à certains moments de l’action conféraient à l’ensemble un attrait supplémentaire.
Avec l’opéra, Grisar a brodé sur la tradition de son compatriote André-Modeste Grétry. Il avait le don de la mélodie, sa façon de mettre un dialogue sur musique était incomparable et ses œuvres respirent généralement la finesse, le charme et l’esprit. Ses opéras reçoivent l’approbation du public et de ses collègues. Dans un article sur «la musique bouffe», une sommité comme Jacques Offenbach nomme Grétry, Rossini et Grisar d’un trait. Après sa mort, ce compositeur flamand qui a passé la plus grande partie de sa carrière à Paris est loué par la presse de la musique française comme «l’un des compositeurs les plus aimés de l’école française» et comme un «savant et fécond mélodiste». Avec Le Carillonneur de Bruges, Grisar a attiré l’attention des Parisiens sur Bruges et le carillon bien avant Georges Rodenbach avec Bruges-la-morte (1892) et Le Carillonneur (1897).
Jan Dewilde, 2005 (traduction: Annick Mannekens)
Pour la location du materiel: Muziekbibliotheek VRO-VRK/Albertina-bibliotheek, Brussel
Réimpression d'un exemplaire de la Bibliothèque du Conservatoire d'Anvers. |
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